Avec cet article, lâauteur, officier supĂ©rieur de la Garde nationale tunisienne depuis peu retirĂ© du service actif, nous propose un rĂ©examen du terrorisme, au prisme de son parcours professionnel comme de ses travaux de recherche. Sâappuyant sur une mise en perspective historique, lâauteur sâinterroge sur les racines du phĂ©nomĂšne et souligne notamment une difficultĂ© et un risque : la dĂ©finition du terrorisme et lâĂ©cueil Ă Ă©viter de la confusion entre terrorisme et lutte lĂ©gitime. Son approche de ces questions, vue dâun praticien de la sĂ©curitĂ© de la rive sud de la MĂ©diterranĂ©e, offre donc un point de vue singulier.
Les opinions exprimĂ©es dans cet article nâengagent pas le CSFRS.
Les références originales de ce texte sont : Mohssen Ben Aissa, « Repenser le terrorisme: Nouvelles menaces, nouvelles politiques », CSFRS.
Ce texte, ainsi que dâautres publications peuvent ĂȘtre visionnĂ©s sur le site du CSFRS :
Repenser le terrorisme : Nouvelles menaces, nouvelles politiques
Â
Repenser le terrorisme : Nouvelles menaces, nouvelles politiques   Â
Le terrorisme[1] ne date pas dâaujourdâhui. Il est probablement aussi vieux que la guerre. Câest un concept vaste qui dĂ©signe des actes trĂšs divers dans des contextes politiques et historiques diffĂ©rents. Il n’est pas nĂ© le 11 septembre 2001 avec l’effondrement du World Trade Center. LâanciennetĂ© historique et la diversitĂ© gĂ©ographique de ce phĂ©nomĂšne sont largement connues des institutions militaires et sĂ©curitaires. Tous les continents ont connu une ou plusieurs formes de terrorisme. Ainsi, lâHistoire porte la marque de plusieurs assassinats et actions politiques. Ces actions servaient autrefois un terrorisme contre des personnes[2]. Elles servent dĂ©sormais un terrorisme dirigĂ© contre des Etats ou des sociĂ©tĂ©s[3].
Ce phĂ©nomĂšne nâa Ă©pargnĂ© aucun pays. Le SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des Nations Unies, Antonio Guterres, a soulignĂ© que le dĂ©partement de la lutte contre le terrorisme a recensĂ©, dans le monde en 2016 : 11 000 attaques dans plus de 100 pays. Elles ont tuĂ© plus de 25.000 personnes et blessĂ© plus de 33.000 individus[4].
Ainsi, notre monde est dĂ©sorientĂ© par ce type de risque qui constitue une menace majeure pour toutes les sociĂ©tĂ©s. Ces dĂ©fis sont trop importants pour quâun seul pays, quel quâil soit, puisse les relever seul.
Les racines du mal
Depuis 1798 date de lâapparition du terme « Terrorisme » pour dĂ©signer un mode de gouvernement, et malgrĂ© la qualification des actes terroristes comme faits criminels en 1934 par la SociĂ©tĂ© des Nations, la violence  terroriste a pris des dimensions inattendues. Le monde semble vivre une nouvelle tragĂ©die de lâhistoire humaine.
La liaison des évĂ©nements de Mars 1881 avec lâassassinat du tsar Alexandre II , les attaques du 11 septembres 2001 aux Etats-Unis, la guerre en Afghanistan et les tensions internes actuelles au YĂ©men, Syrie, Irak et Libye  dĂ©montrent non seulement lâampleur et le dĂ©veloppement du phĂ©nomĂšne  mais relĂšvent  aussi des lacunes et insuffisances dans les stratĂ©gies adoptĂ©es , qui misent sur les solutions sĂ©curitaires et militaires au dĂ©triment des causes rĂ©elles, politiques et économiques.
Depuis la fin de la deuxiÚme guerre mondiale, les mouvements extrémistes ont connu le plus important changement de stratégie. Ils ont adopté des approches qui exploitent les faiblesses des gouvernements dans des domaines sociaux économiques culturels et éducatifs  et qualifient leurs actes comme une réaction du faible contre le fort .
Pour comprendre la genĂšse de ce changement dans la stratĂ©gie des mouvements extrĂ©mistes, il faut revenir Ă deux dates charniĂšres : 1979 et 1990. LâannĂ©e 1979 est dĂ©terminante dans la mesure oĂč elle est marquĂ©e par la conjonction de trois Ă©vĂ©nements capitaux : lâarrivĂ©e au pouvoir de Khomeiny Ă TĂ©hĂ©ran, donc la prise du pouvoir par les radicaux chiites, la prise de la Grande MosquĂ©e de la Mecque âlieu saint musulman- par Jouhaimane Al-Outaili, et lâinvasion de lâAfghanistan par les troupes soviĂ©tiques. Afin dâaffaiblir lâempire soviĂ©tique, des islamistes de tous bords, pro-amĂ©ricains sont envoyĂ©s en Afghanistan pour se battre contre lâArmĂ©e rouge. Câest avec la victoire des Afghans et des volontaires arabes et musulmans du monde entier sur lâArmĂ©e rouge que lâislamisme politique enregistre son succĂšs militaire le plus Ă©clatant, quâil interprĂšte immĂ©diatement en termes idĂ©ologiques.
LâannĂ©e 1990 est caractĂ©risĂ©e par la montĂ©e de lâantiamĂ©ricanisme qui ira de pair avec une exacerbation de la violence des groupes islamistes. Si lâislam radical a Ă©chouĂ© dans ses projets politiques, il se dĂ©veloppe en tant que mouvement terroriste. Et si Al Qaida est crĂ©Ă©e dĂšs 1988, câest dans le contexte de radicalisation des annĂ©es 1990 que cette structure forge sa doctrine, et plus prĂ©cisĂ©ment Ă partir de 1996[5].
Avec lâentrĂ©e en ligne de ces mouvements islamiques extrĂ©mistes en 1990 et lâexploitation de lâarme terroriste Ă des fins politiques, le terrorisme ne marque pas une rupture avec le passĂ©. Les armes, le cadre dâattentats ainsi que certaines tactiques sont les mĂȘmes que par le passĂ©. Seulement lâidĂ©ologie et la science constituent de nos jours les deux mamelles de ce terrorisme moderne.
Par ailleurs, jamais une guerre terroriste nâest sainte, aussi, faut-il rappeler que le terrorisme de nos jours est en partie un produit des grandes idĂ©ologies qui ont marquĂ© les XIX et XX siĂšcles Lâappel Ă la paix lancĂ© par les reprĂ©sentants des grandes religions lors de leur rencontre de Cracovie en septembre 2009 le confirme.
Pour dissiper toute ambiguĂŻtĂ© , le droit islamique reconnait le droit de dĂ©fense lĂ©gitime mais pas le terrorisme et câest ainsi quâil est en conformitĂ© avec lâhĂ©ritage intellectuel occidental qui a fondĂ© le droit de rĂ©sister Ă la tyrannie et initiĂ© les valeurs de libertĂ© de justice et dâĂ©galitĂ© prĂŽnĂ©es par Rousseau, Voltaire et dâautres philosophes depuis des siĂšcles.
Graham Fuller[6], spĂ©cialiste de lâislam[7], qui a publiĂ© un livre intitulĂ©   A World Without Islam, prĂ©cise dans ce livre : « quâ il existe une douzaine de bonnes raisons (âŠ) pour lesquelles les relations entre lâOccident et le Proche-Orient sont mauvaises (âŠ) : les croisades (âŠ), lâimpĂ©rialisme, le colonialisme, le contrĂŽle occidental des ressources Ă©nergĂ©tiques du Proche-Orient, la mise en place de dictatures pro-occidentales, les interventions politiques et militaires occidentales sans fin, les frontiĂšres redessinĂ©es, la crĂ©ation par lâOccident de lâEtat dâIsraĂ«l, les invasions et les guerres amĂ©ricaines, les politiques amĂ©ricaines biaisĂ©es et persistantes Ă lâĂ©gard de la question palestinienne, etc .Rien de tout cela nâa de rapport avec lâislam. ». Enfin lâauteur conclut : « Lâinflexion des politiques occidentales, qui, depuis des dĂ©cennies alimentent chaos et haines, nous incombe », sans omettre toutefois  quâil faille  « sâinquiĂ©ter des discours de haine propagĂ©s par certains prĂȘcheurs radicaux[8]».
Alexander Jamieson[9] dĂ©clare que : « Le terrorisme Ă©volue dans les creusets de nos sociĂ©tĂ©s, sâinfiltre dans les espaces non-contrĂŽlĂ©s entre les Ătats, se glisse entre les nombreuses mailles du filet juridique, et occupe les vides crĂ©Ă©s par les inĂ©galitĂ©s sociales et politiques. En consĂ©quence, les terroristes utilisent ces failles en vue de mieux hĂ©berger et de mieux installer leurs organisations, dĂ©sormais capables de dĂ©fier la souverainetĂ© des Ătats[10] ».
La guerre contre le terrorisme[11]
Lâordre mondial qui a Ă©tĂ©Â Ă©tabli depuis lâeffondrement du bloc soviĂ©tique en 1991  est violemment remis en cause. La suprĂ©matie amĂ©ricaine qui nâavait pratiquement pas Ă©tĂ© contestĂ©e comportait des failles.
La « guerre[12] contre le terrorisme » a des implications mondiales, elle reste lâobjet de controverse dans de nombreux milieux qui demandent son examen sur la base du respect des droits de lâhomme, du droit international humanitaire et le droit au dĂ©veloppement. Nous sommes entre deux courants opposĂ©s sur cette question. Certains mettent la responsabilitĂ© sur les islamistes et appellent à un renforcement de lâapproche sĂ©curitaire, dâautres soulĂšvent des questions fondamentales à savoir : la justice, la libertĂ©, le renforcement de la sĂ©curitĂ© et le dĂ©veloppement humain. Le dĂ©fi auquel le monde est confrontĂ© ne doit pas dĂ©boucher sur une guerre des cultures, mais une guerre contre les fanatiques. Il faut rechercher les racines du mal. En ce sens, les Ătats plus que les mĂ©dias ont leur part de responsabilitĂ©. Le monde a besoin de plus dâhumanitĂ©, de justice, de droits de lâhomme et non dâun recul de ces valeurs.
De plus, la notion de « jihad[13] » est lâun des aspects les plus mal compris et les plus dĂ©formĂ©s de lâislam. Il existe certains musulmans qui exploitent ce concept et qui en font un mauvais usage afin de parvenir Ă leurs fins politiques. Des non-musulmans en donnent une interprĂ©tation dĂ©formĂ©e afin de discrĂ©diter lâislam et les musulmans. Dans le coran, ce mot est employĂ© sous ses diffĂ©rentes formes Ă 33 reprises. Il dĂ©signe la lutte aussi bien au niveau individuel quâau niveau social. Câest la lutte pour accomplir le bien et Ă©radiquer lâinjustice, lâoppression, et le mal dans l’ensemble de la sociĂ©tĂ©. Lâislam promet des moyens pacifiques pour mener au changement et Ă la reforme. Il nâest donc pas admis dâagir en utilisant des arguments pervertis pour justifier l’emploi du terrorisme au profit de leur cause, arguments tels que « dar solh » (la relation entre le califat et ses vassaux chrĂ©tiens); puisque les Etats non-musulmans ont signĂ© des conventions et des pactes avec des Etats musulmans, ou « dar harb » (le domaine de la guerre avec les pays ennemis). De nos jours lâONU tient lieu de pacte liant les pays du monde par un accord de non agression et de paix, y compris les pays musulmans membres de lâONU[14].
Il est difficile voire impossible d’Ă©radiquer le terrorisme dans un monde divisĂ©. Le terrorisme en est dĂ©jĂ Ă un troisiĂšme stade de son dĂ©veloppement. AprĂšs lâĂ©tape des dommages localisĂ©s, il a essayĂ©Â de focaliser le combat dans la sphĂšre de la communication pour produire des effets psychologiques et symboliques en ciblant les populations civiles et menace aujourdâhui de recourir  à la violence nihiliste.
Pour plusieurs raisons, les Ătats arabes, constituent une composante importante dans le dispositif international de lutte contre le terrorisme. Plusieurs pays sont directement ciblĂ©s, sur leur territoire, par un extrĂ©misme radical, avant et depuis le 11 septembre 2001, et dont les acteurs sâinscrivent dans des rĂ©seaux internationaux. Les extrĂ©mistes menacent les Ătats-Unis ou les Ătats occidentaux, mais attaquent aussi et, de plus en plus, les Ătats arabes[15]. Faut-il rappeler que depuis les annĂ©es 1980, le plus grand nombre dâopĂ©rations terroristes spectaculaires a eu lieu en Ăgypte, au Maroc, en AlgĂ©rie, en Arabie Saoudite, en Irak, en Syrie, au YĂ©men, en Libye et en Tunisie. La prise en considĂ©ration du caractĂšre tangible de la menace pour la rĂ©gion et la nĂ©cessitĂ© dâimplication dans la lutte menĂ©e par la communautĂ© internationale, doivent conduire  les pays arabes et occidentaux Ă aller vers une plus grande coopĂ©ration, dĂ©velopper de nouvelles approches dans les politiques de sĂ©curitĂ© et renforcer les partenariats.
DĂ©finir le terrorisme
Toutefois, la lutte contre ce flĂ©au a clairement dĂ©montrĂ© la nĂ©cessitĂ©Â dâaboutir Ă un accord sur la dĂ©finition de ce phĂ©nomĂšne.
Le terrorisme en Tunisie
Le terrorisme nâest pas propre Ă la Tunisie de par sa conduite, sa politique de recrutement, son organisation, ses objectifs et ses origines. Il y a un lien entre le terrorisme tunisien et celui existant dans la rĂ©gion et dans le monde puisquâil sâagit dâun phĂ©nomĂšne international. Ce phĂ©nomĂšne est apparu dans les annĂ©es 1980, Ă la suite de la crise des valeurs, Ă lâanĂ©mie socio-Ă©conomique. Avec le temps, il a connu une Ă©volution dĂ©terminĂ©e par des facteurs idĂ©ologiques et socio-Ă©conomiques.
La premiĂšre pĂ©riode a Ă©tĂ© caractĂ©risĂ©e par lâescalade croissante de la violence du Coup d’Etat de Gafsa en janvier 1980 et sâest terminĂ©e en 1987. La seconde est la pĂ©riode comprise entre fĂ©vrier 1995 (attaque terroriste contre le poste frontalier de la garde nationale rĂ©gion « Sondos » Gouvernorat de Tozeur), et les Ă©vĂšnements terroristes de Soliman en 2007,Gouvernorat de Nabeul. Cette pĂ©riode est caractĂ©risĂ©e par lâespacement dans le temps des attentats. Le soutien actif et passif Ă©tant coupĂ©, le terrorisme est presque Ă©radiquĂ©. La troisiĂšme est celle dâaprĂšs le 14 janvier 2011 jusquâĂ ce jour. La faiblesse de lâĂtat et lâanarchie sĂ©curitaire ont fait accĂ©lĂ©rer la violence. Le point culminant est lâassassinat du leader politique Chokri Belaid en fĂ©vrier 2012. Une lutte anti-terroriste est engagĂ©e Ă travers des mesures militaires et sĂ©curitaires, mais elles ne sont pas suffisantes*.
En Tunisie, le nombre des personnes jugées pour terrorisme a atteint 1500 détenus, a révélé le porte-parole du pÎle judiciaire de lutte contre le terrorisme.
âLe nombre des terroristes tunisiens se trouvant actuellement dans les zones de guerre sâĂ©lĂšve Ă 2929 personnes tandis que le nombre de ceux qui sont revenus de ces zones de conflit avoisine les 160 personnesâ, a-t-il ajoutĂ© lors dâun congrĂšs international sur la jeunesse et le terrorisme tenu Ă Tunis. Et dâajouter que 90% des terroristes revenus des zones de conflit sont incarcĂ©rĂ©s. Il a fait savoir que la tranche dâĂąge des ces terroristes est comprise entre 25 et 29 ans, soulignant que 70% dâentre eux ne sont pas mariĂ©s. Selon les donnĂ©es fournies par le porte-parole, 43% des Ă©lĂ©ments terroristes ont un niveau dâĂ©tudes secondaires, 47% ont un niveau dâĂ©tudes primaires et 4% seulement ont atteint les Ă©tudes supĂ©rieures. Les terroristes ayant rejoint les zones de conflit sont issus du grand Tunis (32%), des rĂ©gions cĂŽtiĂšres (28%), du sud (23%), du centre (9%) et du nord (8%)**.
*https://nawaat.org/portail/2014/07/27/le-terrorisme-en-**tunisie/https://directinfo.webmanagercenter.com/2018/05/10/la-tunisie-compte-1500-personnes-detenues-juges-pour-terrorisme-sofien-sliti/
La plupart des termes utilisĂ©s pour le dĂ©finir crĂ©ent la confusion. Les termes « IntĂ©grisme » et « Fondamentalisme » sont deux concepts Ă©laborĂ©s dans un contexte socio-religieux propre Ă lâOccident. Chacune de ces notions reflĂšte une expĂ©rience et un contexte particulier. Le terme « intĂ©grisme » est propre Ă lâexpĂ©rience catholique, alors que celui de « fondamentalisme » est apparu dans un contexte protestant.
Pour rendre compte de la singularitĂ©Â de ce phĂ©nomĂšne au monde arabo-musulman, certains proposent le concept dâislamisme[16] qui leur semble plus appropriĂ©. LâĂ©tat actuel de cette menace rĂ©vĂšle des consĂ©quences dĂ©sastreuses[17] :
– Elle a terni lâimage des arabes dans le monde occidental ;
– Elle a marginalisĂ© le rĂŽle international de ces pays ;
– Elle a contribuĂ© Ă Ă©largir lâincomprĂ©hension entre les cultures.
Ainsi, la logique de la criminalisation a pris le pas sur celle de lâĂ©valuation et de lâanalyse. Cette situation reprĂ©sente donc un dĂ©fi sans prĂ©cĂ©dent pour le monde arabe.
En effet, les sociĂ©tĂ©s islamiques subissent, à des degrĂ©s divers, des distorsions profondes entre deux cultures : lâune traditionnelle, reprĂ©sentant une force dâenracinement, de conservation, voire de stagnation ; lâautre moderniste, libĂ©rant des Ă©nergies de changements, parfois dâarrachement.
Afin de se prĂ©munir, les Ătats arabes ont prĂ©sentĂ© dĂšs 1972 Ă lâONU des initiatives en matiĂšre de lutte contre le terrorisme, qui ont ensuite Ă©tĂ© approuvĂ©es par les sommets du Mouvement des pays non alignĂ©s et de lâOrganisation de la ConfĂ©rence Islamique et autres institutions rĂ©gionales.
Pour lâinstant, la dĂ©finition demeure toujours source de graves malentendus. La Convention pour la prĂ©vention et la rĂ©pression du terrorisme, adoptĂ©e par la SociĂ©tĂ© des Nations (SDN) le 6 novembre 1937, est la premiĂšre tentative de codification dâune dĂ©finition du terrorisme[18].
Le dĂ©bat sur la dĂ©finition du terrorisme et sur ses causes sâinscrit au sein dâun affrontement politique. Consciente de lâĂ©tendue et de la globalitĂ© de la menace, lâOrganisation des Nations Unies (ONU) a condamnĂ©Â lors de son sommet du 14 septembre 2005, pour la premiĂšre fois, pour tous les gouvernements, et sans rĂ©serve le terrorisme « sous toutes ses formes, quels quâen soient les auteurs, les lieux et les buts », car « il constitue une des menaces les plus graves pour la paix et la sĂ©curitĂ© internationales[19]».
Lâacte terroriste met en lumiĂšre une dimension politique qui sâexprime par la force symbolique d’une « Arme de faibles ».
Cette dimension politique, certes, se traduit en agression contre les valeurs occidentales et en rĂ©volte contre le maintien des dictatures arabes et certaines politiques irresponsables. Elle traduit Ă©galement un sentiment de dĂ©sespoir gĂ©nĂ©ralisĂ© propice aux formes de violence les plus extrĂȘmes. La lutte contre la menace terroriste ne peut donc que relever dâun effort concertĂ©. Le sens stratĂ©gique dicte que la lutte contre ce phĂ©nomĂšne ne peut se concevoir qu’en tenant compte de lâintangibilitĂ© des frontiĂšres, de la souverainetĂ© ou encore des rivalitĂ©s pour un leadership rĂ©gional. L’approche doit Ă©galement prendre en compte les principes de sĂ©curitĂ© humaine et de sĂ©curitĂ© globale, afin de saper les fondements du terrorisme.
Conclusion
  Â
Le recours au terrorisme ne peut ĂȘtre justifiĂ© dâaucune maniĂšre. Les motivations politiques, philosophiques, idĂ©ologiques, raciales, ethniques, religieuses ou autres ne peuvent ĂȘtre avancĂ©es pour justifier un acte terroriste. Toutefois, il y a une diffĂ©rence entre la lutte contre le terrorisme et la lutte lĂ©gitime engagĂ©e par les peuples conformĂ©ment aux principes du droit international pour la libĂ©ration ou lâauto-dĂ©termination[20]. Englober dans un mĂȘme vocable des violences aux causes totalement diffĂ©rentes mĂšne Ă la confusion, voire Ă la guerre et a davantage de terrorisme. Face Ă ce risque de confusion une rĂ©ponse concertĂ©e au niveau international intĂ©grant les pays arabes est nĂ©cessaire.
Certains aspects classiques de la sĂ©curitĂ© (guerres, conflits) sont par la force des choses, devenus secondaires. Lâimportance de la lutte contre le terrorisme, les nouveaux contenus de la sĂ©curitĂ© au niveau des reprĂ©sentations et des pratiques sâimposent dĂ©sormais Ă lâanalyse. Pour autant, alors que le phĂ©nomĂšne terroriste connait une montĂ©e en puissance, la connaissance produite sur ce sujet nâĂ©volue pas au mĂȘme rythme. Dans cette guerre des perceptions oĂč chacun peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme le terroriste de lâautre, repenser la lutte contre le terrorisme passe par un effort de recherche scientifique sachant mieux prendre en compte l’approche des pays arabes en la matiĂšre.
References
Par : Mohssen BENAISSA
Source : Conseil Supérieur de la Formation et de la Recherche Stratégiques
Mots-clefs : Djihad, Djihadisme, Sécurité, Terrorisme, Tunisie