Les Engins Explosifs Improvisés (EEI) : un véritable impact pour l’armée britannique en Afghanistan : 2006-2014

Mis en ligne le 21 Jan 2019

Cet article met en lumière les conséquences in fine stratégiques qu’un mode tactique de guerre asymétrique peut engendrer en contournant la supériorité technologique d’un adversaire. Une illustration donc de cet art du contournement au cœur de la stratégie des fondamentalistes sunnites dans le Helmand. L’utilisation d’EEI a permis aux Talibans d’établir un équilibre militaire au niveau tactique tout en contraignant les mouvements de l’armée britannique en Afghanistan.


Les opinions exprimées dans cet article n’engagent pas le CSFRS.

Les références originales de ce texte sont: « Les Engins Explosifs Improvisés (EEI) : un véritable impact pour l’armée britannique en Afghanistan : 2006-2014 ». Oriane PAILLARD.


Après les attentats du 11 Septembre 2001, les Etats-Unis entrent en guerre en Afghanistan, afin de capturer Ben Laden, de détruire le réseau terroriste Al-Qaeda et de renverser le régime Taliban alors au pouvoir dans le pays[1]. L’intervention se fait sous mandat de l’ONU et à travers la Force Internationale d’Assistance et de Sécurité (FIAS) de l’OTAN. Plus de 50 pays prennent part à cette coalition, dont les Britanniques, deuxième contingent en nombre après les Américains. La campagne militaire initiale menée en 2001-2002 est un succès[2]. Chassés rapidement du pouvoir et abandonnant Kaboul, les Talibans lancent des actions de guérilla contre le gouvernement provisoire d’Hamid Karzai et la FIAS. Ils opèrent principalement dans la région transfrontalière entre l’Afghanistan et le Pakistan. Déployée pour assurer la sécurité dans la capitale, la FIAS élargit progressivement son champ d’action en 2003, jusqu’à recouvrir la totalité du pays en 2006. À son apogée, la force compte plus de 130 000 hommes[3]. A partir de 2011, la responsabilité de la sécurité est progressivement transférée aux forces de sécurité nationales afghanes.

Le cadre de cet article est cette intervention alliée en Afghanistan. Plus particulièrement, nous nous concentrerons sur les opérations militaires britanniques dans la province méridionale du Helmand de 2006 à 2014. Premier épisode de la guerre contre la terreur, l’intervention en Afghanistan a contribué à façonner la géopolitique du XXIe siècle. L’expérience des alliés sur ce théâtre d’opérations a été déterminante et a eu un fort impact sur les crises qui ont suivi au Moyen-Orient et en Afrique. En particulier, les Engins Explosifs Improvisés (EEI) utilisés par les Talibans ont eu des conséquences dévastatrices sur la gestion des opérations par l’OTAN. Selon le Service des Nations Unies pour la Lutte Anti-mines (UNMAS), un EEI est un « dispositif mis en place ou réalisé de façon improvisée […] conçu dans le but de détruire, neutraliser, harceler ou distraire. Il est généralement constitué de composants non militaires »[4]. Ces dispositifs sont particulièrement meurtriers, difficiles à détecter et à neutraliser[5]. Un EEI peut en effet être déployé dans un environnement de combat comme en plein centre-ville, fixé à des animaux, posé le long des routes ou attaché à une personne. La détonation peut être activée par la victime, déclenchée à retardement, ou commandée à distance[6]. Les Talibans recyclent des restes d’explosifs de guerre tels que des obus d’artillerie non explosés ou des mines terrestres, héritage de la guerre avec l’URSS des années 1980. La FIAS a donc dû créer une panoplie d’expertise et de savoir-faire particuliers pour la lutte anti-EEI (AEEI). En effet, les EEI ont entrainé le plus grand nombre de morts au combat parmi les soldats de la coalition : leur utilisation s’est révélée être dix fois plus meurtrière que les mines classiques (plus de 50% des décès)[7]. Entre 2011 et 2015, les médias anglophones ont rapporté autour de 6 320 incidents liés à l’emploi d’EEI à travers le monde, sur un total de 12 566 incidents[8]. Le nombre d’attaques par EEI attribuées aux Talibans représente quant à lui 1 989 incidents. En Angleterre, une littérature académique importante s’est développée pour comprendre l’impact qu’ont eu les EEI sur les opérations de la FIAS, mais aussi sur les interventions militaires occidentales postérieures.

Cet article étudie les problématiques soulevées par les EEI et utilise la littérature anglo- saxonne pour répondre à la question suivante : dans quelle mesure, au-delà de l’impact tactique, les EEI ont-ils fourni aux Talibans un véritable avantage stratégique ?

Après un court bilan des opérations menées par les forces britanniques dans le Helmand, nous nous intéresserons à l’utilisation des EEI par les Talibans sur le terrain et leurs répercussions au niveau des objectifs stratégiques de la FIAS. D’une part, les EEI ont permis aux Talibans d’établir un équilibre militaire au niveau tactique, en faisant pression sur les forces déployées et les infrastructures civilo-militaires et en obtenant le soutien des populations locales. D’autre part, les EEI ont été utilisés pour ralentir et désorienter les mouvements de l’armée britannique et des forces gouvernementales afghanes. Enfin, Les EEI ont contribué à saper la volonté politique du Royaume-Uni à intervenir militairement à l’étranger.

Les opérations Britanniques au « Hell Land »

Dans le cadre de l’opération Herrick, la Task Force Helmand (TFH) composée principalement des forces armées britanniques est intervenue en Afghanistan de 2005 à 2014, dans la province du Helmand. Cette zone fut la plus touchée par les explosions d’EEI et donc la région la plus meurtrière pour les forces alliées. La TFH y a perdu au total 453 hommes[9].

Avec une superficie de plus de 60 000 km2 (presque la surface de l’Irlande) et une population de 800 000 habitants, le Helmand est la plus vaste province d’Afghanistan. Les montagnes du nord furent un bastion de résistance talibane, tandis que le sud de la province était une zone de passage vers le Pakistan. Dans le cadre de l’extension de la responsabilité de la FIAS à l’ensemble du pays en 2003, les Britanniques envisagèrent de s’y déployer. Adoptant une « approche globale » (comprehensive approach), les ministères des Affaires Etrangères, de la Défense et du Développement International organisent alors conjointement l’opération, combinant des axes d’efforts parallèles de développement économique, de sécurité et de mise en place d’une administration légitime. Ce plan est une déclinaison de la stratégie générale des alliés en Afghanistan et souffre de nombreuses faiblesses[10]. En ce qui concerne la province du Helmand, les Britanniques ont demandé à ce que soient écartés le très contesté Gouverneur Mohammed Akhundzadeh et sa milice, seule force luttant efficacement –mais trop violemment- contre les Talibans. Le Royaume-Uni espère mettre en œuvre une opération de maintien de la paix et de reconstruction du pays via une « bataille des cœurs et des esprits ». Ainsi, John Reid, optimiste Ministre de la défense prévoit en 2005 que les soldats anglais seront « parfaitement heureux de partir dans trois ans sans avoir tiré une seule cartouche car notre travail est de protéger la reconstruction »[11].

Depuis 2003, l’effort militaire du Royaume Uni se concentre principalement sur l’Irak. En conséquence, seulement 3 300 soldats britanniques sont déployés dans le Helmand à compter d’avril 2006, formant un unique groupement tactique interarmes. L’armement est lui-même assez limité : sept pièces d’artillerie de 105 mm, une batterie de lance-roquettes multiples, huit hélicoptères d’attaque AH-64 Apache et onze avions GR9 Harrier. Les déplacements terrestres sont extrêmement dangereux du fait de l’omniprésence d’EEI le long des routes. Le transport par hélicoptère est donc primordial mais les britanniques ne disposent que de sept CH-47 Chinook (qui embarquent environ une cinquantaine hommes chacun). Le déploiement des britanniques sur le terrain ne se déroule pas comme prévu. A l’origine, les fantassins devaient intervenir depuis Camp Bastion, une base militaire créée ad hoc au nord-ouest de Lashkar Gah, capitale du Helmand. En réalité, ils seront dispersés dans des postes de section (platoon houses) à l’intérieur des villes, en protection des institutions gouvernementales afghanes. Ces postes sont rapidement isolés et harcelés par les Talibans. Dans le nord de la province, ces derniers ont même réussi à rassembler des centaines de combattants pour assiéger les postes de Musa Qala, de Sangrin et de Naw Zad…

L’empreinte militaire britannique, qui devait rester légère, devient d’un coup beaucoup plus lourde car les soldats sont contraints de riposter par des opérations périlleuses de contre- guérilla. La province est alors surnommée « Hell Land » par les soldats de la TFH. Fin septembre 2006, 29 soldats britanniques ont été tués depuis le début de l’opération. Les Britanniques se heurtent à une résistance acharnée et passent des accords de cessez-le- feu. Le manque de personnels les contraint à se retirer de certaines zones de la province et à laisser l’insurrection s’y développer[12]. La situation devient plus favorable pour les Talibans, qui parviennent à garder l’initiative stratégique[13]. En janvier 2007, quelques centaines d’insurgés s’emparent de Musa Qala, 25 000 habitants. En réaction, les britanniques augmentent leurs effectifs, passant de 3 200 à 6 500 soldats déployés en moins d’un an. Les opérations se font plus offensives, les postes de sections sont remplacés par des bases temporaires mobiles et de nouveaux matériels comme les véhicules de combat d’infanterie MCV-80 Warrior sont mobilisés[14]. A la fin de l’année, Musa Qala est reprise aux Talibans, qui s’adaptent avec de nouveaux modes d’action indirects : embuscades, attaques suicides, et utilisation quasi-systématique d’EEI.

Début 2008, la situation sécuritaire s’est suffisamment améliorée et le « Helmand Road Map » voit le jour. Cette feuille de route propose de réorienter les efforts des alliés vers la reconstruction et les opérations d’influence[15]. Les forces alliées -qui comptent maintenant 8 500 soldats britanniques, cinq bataillons de l’armée afghane et 2000 américains imposent une présence militaire renforcée dans le Helmand. Mais à la fin de l’année, les Talibans reprennent l’offensive dans le cadre de la campagne « Ibrat » qui vise Lashkar Gah. En 2009, alors que les américains lancent l’opération Khanjar au Sud de la province, les Britanniques entreprennent de nettoyer une zone de 12 km très peuplée le long de la rivière Helmand. C’est l’opération Panther’s Claw, qui débute par un assaut héliporté de 350 soldats écossais et gallois transportés par 12 Chinooks[16]. La manœuvre est considérée comme un succès, mais ce mois de juin a été le plus meurtrier pour les forces Britanniques avec dix soldats tués par EEI. En effet, Panther’s Claw a diminué les effectifs britanniques des autres secteurs du Helmand, comme à Sangin, les rendant plus vulnérables. Pour contrôler une province grande comme le Helmand il faut, selon un des principes de la contre-insurrection coloniale britannique, un ratio d’en moyenne 20 à 25 soldats pour 1 000 habitants[17]. La TFH, qui comptait à son apogée un peu plus de 9 500 hommes pour les 800 000 habitants de la région (ratio de 8,5), était donc sérieusement limitée dans ses objectifs. Enfin, 10 000 soldats américains supplémentaires sont déployés dans le sud du pays en 2010. Une grande offensive de « nettoyage » est ainsi entreprise sur le fleuve Helmand en février de la même année et permet aux alliés de reprendre l’initiative. Ces renforts ont également pour but de participer à la montée en puissance des forces gouvernementales Afghanes et de recentrer la mission de la FIAS sur la protection de la population. La conférence internationale de Londres du 28 janvier 2010, organisée par le Premier Ministre britannique Gordon Brown, confirme ainsi le retrait anticipé des forces occidentales et la nécessité de transférer au plus vite la gestion du conflit aux autorités afghanes.

L’utilisation tactique des EEI et ses répercussions stratégiques

Rappelons que le principal objectif de la FIAS est la mise en place d’un gouvernement démocratique stable et autonome afin que le pays ne redevienne pas un foyer du terrorisme[18]. Les Talibans quant à eux veulent le départ des forces armées étrangères et l’établissement d’un Etat Islamique en Afghanistan. Les EEI leur ont permis d’affirmer leurs objectifs stratégiques et de saper ceux des Britanniques : habituées aux guerres classiques, les forces armées des pays occidentaux se sont révélées peu efficaces contre une insurrection terroriste[19].

Ces EEI ont permis aux insurgés, limités en termes de moyens techniques conventionnels, de mettre sérieusement en difficulté les forces Britanniques[20]. Les Talibans évitent les actions de combat rapproché, où ils ont un désavantage majeur et utilisent les EEI pour parer à leurs propres faiblesses, contourner la supériorité technologique et politique de la FIAS, et accroître ainsi sa vulnérabilité. La pose d’EEI a donc connu un développement rapide dans le Helmand à partir de 2005 (530 incidents en 2005 contre 1297 en 2006)[21]. En 2006, environ 30% des pertes de la FIAS sont dues aux EEI. Ce pourcentage passe à 40% en 2007 et à plus de 50% en 2008[22]. De septembre 2007 à juin 2008, 19 soldats britanniques sont victimes d’EEI, alors qu’aucun n’est directement tombé sous le feu ennemi[23]. Les alliés s’aperçoivent que le renforcement de leurs effectifs dans le Helmand a du même coup augmenté le nombre de convois routiers et donc de cibles. Des véhicules commandés en urgence dès 2007 comme les véhicules blindés MRAP (Mine Resistant Ambush Protected) Ridgeback et Jackal ou encore la nouvelle version des Véhicules à Haute Mobilité (VHM) BvS10 Viking sont commandés en urgence et déployés courant 2008, assurant incontestablement une meilleure protection mais au prix d’une posture plus agressive[24]. Dans toute campagne anti-insurrectionnelle, le soutien de la population est un objectif majeur. Et nous avons vu que l’opération Herrick avait pour objectif stratégique principal premier de « gagner les cœurs et les esprits »[25]. En face, les Talibans avaient juste besoin de la coopération passive des habitants. De plus, les soldats britanniques ont reçu un équipement individuel AEEI de plus en plus imposant. Surnommée « Osprey », la veste seule pèse près de 10 kilos, à cause des plaques de protections en céramique fixées sur le torse et le dos[26]. Véritable armure leur donnant une apparence hostile, les relations personnelles entre les soldats avec la population en sont devenues de plus en plus compliquées[27]. Les britanniques ont ainsi eu du mal à établir des liens significatifs avec les membres importants des communautés locales afghanes et chefs locaux. Selon Olivier Grouille, même si la FIAS était arrivée à protéger complètement ses hommes contre les EEI, elle n’aurait pas réussi à gagner le soutien stratégique de la population[28]. À l’inverse, David Kilcullen a fait remarquer qu’en Afghanistan, moins la menace EEI était forte, plus les forces armées étaient efficaces dans leurs interactions avec les locaux, car elles pouvaient adopter une posture moins menaçante[29]. Ainsi, les EEI ont fourni aux Talibans un avantage stratégique, empêchant les forces armées alliés d’être au contact de la population. Les insurgés ont réussi à imposer leurs messages tout au long de ce que les commandants américains ont qualifié de « guerre des récits »[30].

Ensuite, les Talibans ont utilisé les EEI afin de restreindre la mobilité des forces britanniques. En plus d’un équipement de plus en plus lourd, les routes devaient être systématiquement inspectées par les services AEEI avant et pendant chaque déplacement, ce qui ralentissait considérablement les opérations terrestres. De 2006 à fin 2007, l’armée britannique ne disposait seulement que de deux équipes de déminage AEEI pour tout le Helmand ![31] En juin 2008, des attaques par EEI sur les routes tuent neuf soldats britanniques en dix jours. Les MRAP protègent au mieux les hommes sur le terrain mais ne sont pas infaillibles. D’ailleurs, le faible nombre d’hélicoptères de transport dont dispose la TFH n’offre guère d’autres alternatives. Les officiers britanniques estiment être trop dépendants des routes afghanes, alors que les marines américains installés dans le sud de la province sont capables de déployer 600 hommes d’un coup en utilisant leurs Chinook[32]. Par exemple, pendant la reprise de Musa Qala en décembre 2008, avec l’aide des Etats- Unis, plus de 2000 soldats britanniques et afghans et un bataillon entier de l’armée américaine ont été transportés au nord de la ville, permettant son encerclement. Mais même sur les opérations héliportées, les EEI restent une menace. Les Talibans se sont mis à utiliser des matériaux comme du plastique et même du bois, que les détecteurs de métaux Vallon utilisés par les forces alliées ne repèrent pas[33]. Toujours à Musa Qala, après la fuite des Talibans et des combats limités, la progression des alliés est ralentie par ces dispositifs. Les progrès dans la sécurisation et le développement de la ville sont très lents, les forces alliées ne contrôlant que le centre du district et faisant l’objet d’un harcèlement permanent. Autre exemple, durant l’opération de nettoyage Panther’s Claw, l’essentiel des blessures et morts liées aux EEI ont résulté du nombre limité d’hélicoptères de transport disponibles pour les forces britanniques : à peine trente appareils pour les 5 000 soldats de la FIAS concentrés dans la région[34]. L’utilisation systématique d’EEI dans le Helmand a permis aux Talibans de garder le contrôle des zones rurales et montagneuses. Les forces afghanes et la TFH ne se sont pas parvenues à tenir le terrain dans la durée et ont été contraintes de maintenir une posture défensive et réactive, laissant l’initiative stratégique aux insurgés[35]. Ainsi, pendant le deuxième trimestre de l’année 2010, il y eut plus d’attaques dans le Helmand que dans toutes les autres provinces du pays[36].

Les Talibans ont également utilisé des EEI pour détruire des infrastructures gouvernementales et humanitaires[37]. Ils ont par exemple tenté d’empêcher la reconstruction du Barrage de Kajaki au nord du Helmand[38]. Ce projet, baptisé Eagle’s Summit était l’une des opérations militaro-économiques menées par la TFH ayant pour objectif de regagner la confiance de la population[39]. Le but de la mission était l’installation d’une turbine hydroélectrique sur le fleuve, pour fournir de l’électricité à 1,8 millions d’habitants. Il aura fallu plus d’un an de combats pour que les britanniques parviennent à sécuriser la zone et à construire une route pour transporter les différents éléments nécessaires à l’assemblage de la turbine. Ce projet entamé à l’été 2008 exigea la participation de 5 000 hommes, dont 2000 Britanniques, un appui aérien américain, français et néerlandais et une centaine de véhicules blindés AEEI. Les convois, en provenance de Kandahar, furent précédés par des reconnaissances de drones et la sécurisation des points sensibles du trajet par les forces spéciales[40]. D’un point de vue stratégique, Kajaki a permis d’offrir un objectif « mobilisateur pour les hommes, valorisant pour les médias et attirant pour un ennemi par ailleurs difficilement saisissable »[41]. Elle s’est néanmoins soldée par un échec puisque la turbine n’était toujours pas fonctionnelle après le retrait de la FIAS du pays en 2015, le barrage ayant été endommagé par de nombreux EEI[42]. Les EEI ont ainsi permis aux talibans de retarder voire même d’attaquer des projets d’infrastructure, démontrant au passage l’inefficacité du gouvernement intérimaire. En plus de la division entre civils et militaires, les EEI ont amoindri la capacité de la TFH à mener à bien des opérations militaires et de reconstruction du pays et ont donc bien donné aux Talibans un avantage stratégique à long terme[43].

La révision de la politique de défense britannique

Au sein de l’OTAN, le Royaume-Uni demeure le principal allié militaire des Etats-Unis, ainsi que l’engagement en Afghanistan a pu le montrer. Mais l’implication des armées britanniques dans les conflits modernes au Moyen-Orient a eu d’importantes retombées sur les soldats, les matériels, les finances et l’opinion publique[44]. L’opération Herrick a également soulevé la question de l’autonomie militaire du Royaume-Uni à l’égard des États- Unis. Le pays s’est vu reprocher son suivisme et la surestimation de sa capacité d’influence sur la politique étrangère américaine. Il faut néanmoins souligner les différences des approches nationales entre les États-Unis et le Royaume-Uni. Premièrement, des désaccords sur le recours aux bombardements aériens sont apparus dès 2006 : la THF considérait que les opérations contre-terroristes « excessives, disproportionnées et peu ciblées » des américains dans le Helmand sapaient leurs efforts de conquête des « cœurs et des esprits »[45]. Deuxièmement, lors de la formation des polices, les britanniques ont préféré un modèle de police civile. Cette optique a été systématiquement critiquée par les militaires américains qui ont imposé leur modèle de police paramilitaire capable de combattre les insurgés. Troisièmement, le renforcement de l’engagement américain sur le théâtre afghan en 2009- 2010 avec 30 000 hommes déployés en plus (dont 10 000 dans les provinces de Helmand et Kandahar) n’a pas enthousiasmé les Britanniques. Avec environ deux cents soldats tués, 2009 et 2010 sont les années les plus sanglantes qu’aient connues le Royaume-Uni. Gordon Brown, alors premier Ministre, a choisi de ne déployer que 500 soldats supplémentaires. Les Talibans ont profité de ce manque d’unité politique et ont réussi à éroder la volonté des forces occidentales à continuer le combat. Les attentats-suicides, à forte résonnance médiatique, sont devenus de plus en plus courants vers la fin du conflit : 248 attentats suicides ont eu lieu en 2015 contre 6 en 2004[46]. De même, la pose d’EEI le long des routes a une connu forte recrudescence de 2010 à 2015 (4 216 occurrences)[47]. Face à cette stratégie d’usure et le mécontentement des opinions publiques, les Etats-Unis et les Britanniques ont finalement annoncé la démobilisation progressive de leurs forces et le remplacement de la FIAS par une opération de moindre envergure (Resolute Support) en 2014. Depuis, les anglo-saxons rechignent à déployer des troupes au sol sur les différents théâtres de guerre du Moyen-Orient et ont adapté leur doctrine stratégique en conséquence[48].

La volonté politique d’intervenir en Afghanistan et en Irak a mobilisé les ressources militaires du Royaume-Uni au-delà de toute attente. La réflexion amorcée par la FIAS pour redéfinir sa stratégie s’est accompagnée d’une production abondante de travaux dans les sphères militaires et académiques anglaises. En ce qui concerne la lutte contre les EEI, le Professeur Théo Farrell de Kings College London soutient que l’armée Britannique a su s’adapter à la menace à partir de 2008[49]. Un rapport du gouvernement paru cette année-là, la Burley Review, estimait que la posture des forces armées concernant les EEI devait devenir plus agressive. En prenant exemple sur les américains, Londres créa pour le Helmand une force d’intervention spécialisée AEEI, baptisée « Torchlight »[50]. Travaillant en coopération directe avec les services de renseignement militaires de Camp Bastion, utilisant des outils biométriques et des interventions ciblées des forces spéciales, Torchlight a été capable d’attaquer directement et efficacement les réseaux EEI[51]. De plus, depuis 2010, l’armée britannique forme tous ses personnels aux techniques de désamorçage et de déminage, et a mis en place une procédure opérationnelle normalisée (nom de code « Barma ») pour sécuriser les routes lors des opérations terrestres. De nouveaux équipement AEEI comme les véhicules blindés Buffalo et Mastiff, ou les robots démineurs Talon ont également permis de réduire le pourcentage de pertes alliées dues aux EEI : moins de 50% en 2011, et autour de 30% en 2013[52]. Les EEI ont néanmoins brutalement mis à jour l’insuffisance des transports militaires et l’inadaptation des armements, entrainant des pertes humaines non anticipées et des surcoûts liés à l’achat de matériels adaptés[53]. Nous avons vu que le gouvernement a dû déployer en urgence opérationnelle des MRAP et autres matériels AEEI et que la TFH manquait d’hélicoptères de transport. Le surcoût qui en a découlé s’élevait ainsi à plus de 15 milliards de livres dès 2006[54]. De plus, l’achat de ces équipements spécifiques ont permis une parade immédiate aux actions des Talibans mais n’ont pas préparé l’armée britannique aux conflits futurs. La lourdeur de l’effort militaire ainsi que ces nouvelles contraintes budgétaires et matérielles ont également contraint le gouvernement britannique à réviser l’ensemble de sa politique de défense. Deux rapports supplémentaires portant sur le processus d’acquisition des matériels ont été publiés en 2009 : le Gray Rapport et la Nimrod Review[55]. Ces deux documents mettent en évidence le décalage entre les objectifs politico-militaires et les moyens financiers[56]. Le second rapport établit qu’il faut définir les intérêts de sécurité avant de réformer l’organisation militaire. Une redéfinition stratégique était donc nécessaire et fut lancée dans le cadre d’une nouvelle Strategic Defence and Security Review (Examen stratégique de défense et de sécurité- SDSR) parue en 2010[57]. La SDSR a limité les engagements militaires potentiels du Royaume-Uni à l’étranger, en mettant au premier plan les menaces terroristes et la nécessité de réduire les dépenses publiques. Le budget de la défense a de ce fait subi une coupe d’environ 8 % et ses effectifs ont été réduit de 40 000 hommes entre 2010 et 2015, dans le contexte de la crise financière de 2008-2009[58].

Conclusion

Les acteurs asymétriques disposent de moyens disproportionnés et d’objectifs militaires et politiques divergents. Les Talibans ont contourné la supériorité technologique adverse en privilégiant les actions indirectes sur les points les plus vulnérables des forces britanniques. Dans cet article, nous nous sommes penchés sur les EEI. En Afghanistan, l’utilisation d’EEI par les Talibans s’est accrue à partir de 2005 et est devenue systématique à partir de 2008, augmentant du même coup le nombre de tués et de blessés parmi les forces alliées. Les forces britanniques opérant dans la province du Helmand ont été particulièrement touchées, et une littérature académique importante a vu le jour pour analyser en profondeur les effets des EEI aux niveaux tactique et stratégique. Les efforts initiaux de la TFH pour mettre en œuvre une approche globale et une aide au développement et à la population ont échoué. La TFH était en permanence divisée entre ses principes de stabilisation douce et des opérations de contre-guérilla nécessaires pour assurer sa propre sécurité. Les EEI ont donc joué un rôle majeur en tant que mode d’action novateur dans une guerre contre- insurrectionnelle difficile. En générant un sentiment d’insécurité disproportionné entre les populations civiles et les militaires déployés sur le terrain, ils ont sapé l’objectif stratégique allié visant à gagner le soutien de la population. Ils ont également freiné les opérations de reconquête du territoire en limitant les déplacements par voie terrestre. Enfin, la guerre d’usure des Talibans a eu raison de la volonté politique des pays occidentaux de poursuivre la guerre. Au Royaume-Uni, cela s’est traduit par une remise en cause des capacités militaires du pays et l’élaboration d’une nouvelle stratégie de défense à partir de 2009.

Bien sûr, les EEI ne sont pas seuls responsables de l’enlisement britannique (et Américain) en Afghanistan. D’autres facteurs comme le manque d’effectifs et d’équipements ont exacerbé le problème, permettant, in fine, aux Talibans de conserver un avantage non- négligeable sur le terrain. Si le bilan de la TFH fait l’objet de critiques, certains experts reconnaissent toutefois qu’avec des moyens limités, les Britanniques sont parvenus à corriger une stratégie défectueuse et qu’ils ont fait des progrès en contre-insurrection ainsi que dans la mise en œuvre de l’approche globale[59].

L’expérience Britannique en Afghanistan s’est terminée en 2014, mais la propagation des EEI est devenue un défi à l’échelle mondiale. En 2015, des pays qui n’avaient jamais été affectés par des attaques EEI ont été touchés. Le Tchad et le Cameroun ont ainsi été ciblés pour la première fois[60]. Au Nigéria, le nombre de victimes dues aux EEI a été 14 fois supérieur en 2015 par rapport à 2011[61]. La France est fortement impliquée dans la lutte contre les EEI, à travers l’Opération Barkhane dans la bande sahélo-saharienne mais aussi via de nombreuses autres actions bilatérales au profit des états de la région (le G5 Sahel par exemple). Elle joue également un rôle moteur au sein du forum de désarmement qu’est la Convention de Genève, et a animé plusieurs événements sur le thème les EEI. Vu la menace grandissante posée par les EEI et les réseaux terroristes qui y sont associés, la communauté internationale réclame de plus en plus un plan d’action. Dans cette optique la résolution 70/46 de l’ONU visant à « contrer la menace posée par les engins explosifs improvisés » fut adoptée en décembre 2015. Les EEI deviennent de plus en plus sophistiqués, prouvant l’existence de réseaux criminels de plus en plus élaborés. Ainsi, les EEI sont devenus bien plus qu’une arme de niveau tactique « au point où ils ont un impact humain, opérationnel, politique, financier et psychologique sans précédent sur les Nations Unies »[62]

Cartographie


Les provinces d’Afghanistan

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La province du Helmand

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